elle lui dit
« souris-moi » quand il vient la voir
depuis son
appartement 139, elle chambre 302
il dit qu'il ne peut
pas lui sourire
parce qu'il voudrait
être tout entier sourire
quand il la retrouve
elle s'en fiche un
peu de ce qu'il dit
elle voudrait plutôt
qu'il arrête de la houspiller
et de l'envoyer à
l'autre bout de la ville
chercher des clous
et des pointes
qu'il ne peut plus
pointer et pour quoi ? Il met trois heures pour se hisser sur un
escabeau
il voudrait conduire
sa voiture aller voir la mer il fait à peine trois pas seul et
s'essouffle
et quand je lui
parle à lui à qui je parle ? quand d'un coup d'aile il dérive
et ne me reconnaît
plus et me confond il ne sait plus avec qui
il a perdu ses clefs
et ses carnets d'adresse et les feuilles jaunes de l'annuaire
il dit que ça va
mieux et qu'il a hâte de retourner là-bas, ici avec elle et qu'ils
retrouveront un peu de paix
elle se trouve assez
bien chambre 302 il ne la fatigue plus elle l'aime mais c'est la fin
quand même
ç'aurait été bien
qu'elle parte d'un seul coup et lui de chagrin il serait mort
elle rit
alors je lui dis
qu'en prime j'aurais peut-être écrit un beau poème !
Elle rit
et j'oublie de lui
téléphoner à lui après ma visite à elle
des femmes de ménage
passent, une infirmière, la porte est toujours ouverte
je vois les cernes
sous les yeux les tâches sur la chemise, les mains violettes de sang
les yeux durs et des corps qui s'épuisent à juste rester en vie un
peu juste un peu encore
une fois encore elle
a ressuscité une fois encore j'ai cru la perdre
c'est étrange cette
vieillesse qui n'en finit pas et qui les vide, lui et elle, de
quelque chose
qu'ils étaient
pas forcément
aimable pas toujours aimé difficile difficile à vivre entre mes
mains
mais quelque chose
qu'ils étaient et qui se délite
sous leurs yeux
en regardant
recouvrance et hier et quoi devant ?
7 octobre 2015
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