Parfois je suis visitée parfois non.
Les poètes sont des saintes ou des bergères, des enfants de grottes (quelqu’un leur apparaît, ils voient des apparitions, on ne sait comment dire)
enfants des grottes et des marécages, les simples parlent alors des langages inouïs que le temps plus tard gravera.
Quand un enfant naît on ne sait pas s’il deviendra poète ou saltimbanque ou banquier ou tout à la fois, on ne sait pas l’enfant ébloui frappé de foudre et de foi
le voici condamné tout en même temps jeanne d’arc et bernadette, hildegarde et siméon – il devient fou et très vivant. Comme un œuf.
Il ne guérit jamais
il apprend très jeune le deuil de la mesure et de la sagesse
il demeure toute sa vie l’enfant des marécages de la visitation et du langage - on ne peut rien fabriquer de solide et de simple avec des éclairs des auréoles et des dames en lévitation.
Ébranlés, frappés de stupeur, illuminés, les enfants des grottes traversent vos vies et la leur en transparence, sur des nuages, en chapeau mou, talons aiguilles, innocents, stupidement innocents – ils ne connaissent pas le mal qu’en traversant ainsi ils sont à même de commettre.
On ne les guérira jamais du Jour de la Visitation.
Ils grandissent comme chiens aux aguets et attendent leur vie durant les disparitions et la fin des choses
car les enfants frappés de lueur savent désormais que la lumière, la dame auréolée, l’éclair, l’aurore boréale, la lave et les dinosaures
s’ils sont apparus alors peuvent disparaître.
Les enfants de boue et de foudre sont pétris de logique et de fatalité ; car la logique et la fatalité sont les sœurs siamoises de la Révélation.
20/12/2023 – 12/03/2024
©anne jullien